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La saga Twilight, romans sur les vampires écrits par Stéphénie Meyer, connait un succès étonnant et arrive juste après les livres de la série d’Harry Potter, et les deux films sortis à ce jour suivent le même schéma. [1] La série de Meyer s’inspire de romans et films culte plus anciens, eux-mêmes tirés de légendes européennes sur les vampires. Les légendes les précèdent même, car depuis très longtemps les anciennes religions faisaient état d’êtres surnaturels prédateurs des humains, consommant le sang ou la chair des vivants, contes présents dans les traditions hébraïques, hindous, perses, grecques et de Babylone, tout comme en Afrique et dans l’Amérique précolombienne.

 

Les légendes européennes semblent avoir largement circulé au Moyen Age dans la culture traditionnelle orale de plusieurs peuples chrétiens, parfois dans des écrits d’ecclésiastiques (bien que très rarement) et n’ont été rassemblées qu’à partir des années 1700. Les légendes sur les vampires étaient répandues principalement en Europe du Sud-Est, où il y avait une plus grande tendance à la superstition que dans des sociétés urbaines plus développées, mais apparurent aussi ailleurs, par exemple en Russie et en Allemagne. Le folklore oral de plusieurs groupes ethniques décrit généralement le vampire comme un être « non-mort » possédé par un esprit du mal, parfois un suicidé ou un sorcier, mais souvent un cadavre mordu par un vampire.  Le mot « vampire » peut dériver d’une chaîne d’adaptations linguistiques que l’on peut faire remonter à travers le français et l’allemand (vampyre et vampir) jusqu’au serve vampire, au polonais wapierz et jusqu’à de nombreuses variantes slaves dans d’autres pays, telles que upir, upyr, et upior. Selon certains étymologistes, le terme viendrait du mot turc pour sorcière – par exemple le tartare ubyr.

 

La légende est devenue populaire dans la littérature occidentale par des romans très prisés, en commençant par « Le vampire » de John Polidari, publié en 1819, et par Dracula de Bram Stocker, publié en 1897. Ce dernier fournit les éléments de base aux principales œuvres de fiction sur les vampires. D’autres romans offrant des intérêts littéraires de divers degrés ont été publiés depuis, mais peu d’entre eux, pour ne pas dire aucun, s’éloignent du « schéma » de base. En outre, l’on trouve littéralement des centaines de films traitant ce sujet. Les plus notables sont le film allemand de 1922 Nosferatu, et Dracula de Universal Picture en 1931, avec Bela Lugosi, suivi d’une série de huit films Dracula dans les années 1950 et 1960, avec Christopher Lee. Parmi les films suivants on trouve l’interprétation par Francis Ford Coppola du Dracula de Bram Stoker (1992) avec Gary Oldman et Winona, et Interview with a vampire de Neil Jordan en 1994, d’après le roman d’Anne Rice du même nom, avec Brad Pitt et Tom Cruise.

 

Nombreux sont les produits dérivés tels que la série télévisée britannique Young Dracula qui a été diffusée en 2006, la série télévisée américaine Buffy the vampire slayer, diffusée de 1997 à 2003, et le dessin animé japonais Vampire Knight, publié pour la première fois en 2008, ainsi que les autres séries telles que Blood Ties, Moonlight, Being Human, et True Blood. Dans un numéro de 2000 du SCP Journal, Tal Brooke s’interroge sur les causes éventuelles de ce phénomène culturel.

Les vampires, ténèbres incarnées, sont un apport  parfait pour repousser les limites que nous connaissons et acceptons. Le public désensibilisé se laisse prendre au piège sans s’en rendre compte. Les limites morales sont constamment repoussées, presque sans interruption, et ceci depuis les premiers jours de la télévision en noir et blanc. Que nous le voulions ou non, les media sont un agent du changement, gagnant de grosses sommes d’argent et influençant les populations. Si une publicité de 20 secondes peut changer l’opinion, combien une émission d’une heure…

Il est devenu évident que les producteurs du vingt-et-unième siècle ne respectent ni la morale ni le folklore vampire lorsqu’ils changent les règles pour s’adapter à leur temps. Ils clonent, mélangent et se mettent au goût du jour. Le crucifix est sans importance, tout comme l’eau bénite, supprimant le Christianisme de l’équation. [2]

Le thème du vampirisme semble ne jamais perdre de son intérêt. Pour l’année 2009 uniquement, sept films ont été présentés, y compris New Moon, qui s’inspire du second livre de la saga Twilight, le troisième et le quatrième film devant suivre sous peu.

Les thèmes des vampires  sont aussi importants dans des films sur la fin du monde tels que The Last Man on Earth (1964) avec Vincent Price, Omega Man (1971) avec Charlton Heston, et I am a Legend (2007) avec Will Smith. Ces derniers films ont tous en commun la disparition de tout contenu surnaturel et l’attribution de tous les maux à des causes purement physiques. Les vampires zombis dans I am a Legend, par exemple, sont des humains devenus des monstres suite à une épidémie répandue accidentellement par des scientifiques cherchant à soigner le cancer. Le mal est entièrement naturel dès l’origine. Dans ce film, comme dans la plupart des autres manifestations monstrueuses de la culture d’horreur, le monstre a une force surhumaine et des pouvoirs cognitifs sinistres, est vicieux, meurtrier et hideusement laid.

twilight 2008Mais le monstre n’est pas toujours présenté sous cette forme d’anomalie tragique. De plus en plus souvent, le monstre apparaît comme une nouvelle race d’humains sophistiqués qui suscite notre sympathie – et même notre identification à ce qu’il est. Dans ses manifestations les plus séduisantes, il possède une force et une intelligence surhumaines, il est plus moral que ses prédécesseurs, et il a une grande beauté physique. Lors des premiers temps de la fantaisie vampire, le lecteur ou le spectateur tremblait de peur et y trouvait le frisson de l’évasion. De nos jours, nous sommes stimulés par un mélange de fascination et de paranormal mystérieux et y trouvons l’excitation d’un désir sensuel.

De nombreux auteurs ont souligné dans leurs études sur ce genre que la soif du sang des autres êtres vivants est une métaphore du désir sexuel. Il est important de noter à ce sujet que le vampire de légende ne tue que rarement ses victimes ; le plus souvent il contamine la victime, la changeant en vampire. E. Michael Jones a écrit qu’à la base de l’accroissement phénoménal de la culture d’horreur se trouve la suppression de la conscience. Jones a étudié ce phénomène à partir du roman de Mary Shelley, Frankenstein, (publié pour la première fois en 1818) jusqu’au film de Ridley Scott, Alien en 1979 et les suivants et il pense que le refus de loi morale produit des monstres métaphoriques qui sortent du subconscient des créateurs et se répand dans la société par leurs œuvres culturelles. Le monstre dans le film Alien, par exemple, abhorre plus que tout les femmes, et le salut n’est possible que par l’expulsion de sa progéniture qu’il implante et incube dans les humains – éruption inconsciente de conflits internes (et de culpabilité) - au moyen de l’avortement.

Comme Jones le souligne :

En suivant nos désirs illicites jusqu’à leur aboutissement logique qui est la mort, nous avons créé une culture cauchemardesque, une culture de films d’horreur, dans laquelle nous sommes encore et toujours ramenés à la source de nos peurs mystérieuses par des forces que nous ne pouvons pas contrôler. [3]

Même si l’homme moderne refuse l’autorité de la conscience morale, il ne peut lui échapper. Il est créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, et au plus profond de la loi naturelle de son être, la vérité continue à lui parler, même s’il refuse catégoriquement l’existence de Dieu (dans le cas des athées) ou minimise l’autorité divine (dans les cas de ceux qui ne sont chrétiens que de nom, les athées pragmatiques). Afin de vivre avec cette fragmentation intérieure, qui est un effet inévitable d’une conscience bafouée, il en est réduit à soulager ses souffrances par trois moyens différents :

 Il mène une guerre ouverte à la conscience et à toutes ses restrictions morales, et poursuit avec une obstination radicale la consommation offensive de satisfactions sensuelles – généralement une plongée dans plusieurs sortes d’addictions et une vie de promiscuité sexuelle.

 Plus passivement, il n’écoute pas la voix intérieure de sa conscience et s’en éloigne par des satisfactions sensuelles et émotionnelles, généralement la recherche d’amour sans responsabilité et des efforts ininterrompus pour atteindre un succès mondain.

 Il essaie de rationaliser une forme propre de conscience, fondée sur des valeurs telles que la « tolérance » et le « non-dogmatisme ». En général, cela produit une nouvelle sorte de moralisme pervers, un côté moralisateur qui est, paradoxalement, complètement intolérant à l’égard de la vraie vertu. Son anti-dogmatisme est son propre dogme. Il n’y a ici aucun rejet absolu de moralité, mais plutôt une réécriture selon des sentiments subjectifs.

Aucun des mécanismes ci-dessus n’a besoin d’être conscient. Ils ont sans aucun doute tendance à être un processus subconscient par lequel une personne sent qu’elle recherche sa propre identité, vit en toute liberté, cherchant sa voie dans la vie, et en obtenant une part de bonheur. Bien qu’il ressente parfois un vide intérieur, il pense que le remède à ces moments obscurs sera obtenu en augmentant la dose de cette même drogue qui est en train de le tuer.

La saga Twilight, semble-t-il, suit le troisième mécanisme mentionné ci-dessus en c), celui qui s’adresse au plus large public possible. Les livres ont reçu de nombreuses récompenses, en particulier le British Book Award pour The Children Book of the Year (Livre pour enfant de l’année) et le Kid’s Choice Award for Favorite Book en 2009. A ce jour plus de 85 millions de livres ont été vendus et la saga a été traduite en 38 langues. Bien que ce soit des romans pour adolescent mal écrits, ce sont des romans à sensation avec une touche d’horreur surnaturelle jointe à des sentiments faisant battre le coeur et des relations entre adolescents des deux sexes. Tout comme avec la série Harry Potter, le sang est un thème crucial, en rapport avec la vie elle-même et inextricablement lié au thème de l’immortalité. Mais alors que le côté romantique n’est que secondaire dans la série Harry Potter, il joue un rôle moteur dans les romans de la saga Twilight, le vampirisme y ajoutant du piquant.

Dans le premier volume, Twilight, une jeune lycéenne dénommée Isabella (Bella) Swan, fille de parents divorcés, déménage dans la petite ville de Forks sur la côte de l’Etat de Washington afin de vivre avec son père, chef de la police locale [4]. Elle ne l’a pas vu depuis son enfance et le trouve gentil mais peu communicatif – la quintessence du père absent. Inscrite au lycée local, Bella est attirée par un garçon beau et mystérieux dans la même classe qu’elle, Edward Cullen. Accablée d’une mauvaise image d’elle-même, Bella se demande si Edward est lui aussi attiré par elle, ou s’il la déteste, car il se comporte envers elle d’une façon imprévisible et avec des signes confus. Puis un jour il la sauve d’un accident de voiture imminent, manifestant ce qui semble être une force surhumaine pour faire dévier le véhicule qui aurait pu la tuer. Elle demande une explication, et comme leur relation se développe petit à petit, il lui révèle qu’il « n’est pas comme tout le monde ». Elle se rend compte progressivement qu’il est un vampire et Edward confirme ses doutes quand il lui dit : « Je suis le prédateur le plus dangereux au monde. Tout en moi t’attire. Ma voix, mon visage, même mon odeur… Je suis conçu pour tuer… J’ai voulu te tuer. Je n’ai jamais tant désiré du sang humain dans ma vie… Ton odeur, c’est comme une drogue pour moi. Tu es comme mon héroïne personnelle. »

Tout ceci est dit de la voix basse, essoufflée d’un amant passionné. C’est du désir sensuel, c’est un désir à peine retenu. C’est vraiment une nouvelle sorte de vampire. Il n’y a pas de crochet dégoulinant de sang, ni de capes noires, pas de commerce rituel avec les défunts, pas de crainte de la lumière du jour, juste une aversion de la lumière directe du soleil parce que sous ses rayons, la peau brille comme des diamants. « Tu es beau ! » s’exclame Bella quand Edward  ouvre sa chemise et laisse voir sa chair étincelante.

Bella est alors présentée aux membres de la famille Cullen. Nous apprenons qu’ils ne mangent pas une nourriture normale et ne dorment pas du tout. Ils semblent être des gens intelligents, cultivés, sensibles et « attentionnés ». Ils possèdent aussi une étonnante force physique, peuvent courir plus vite que des chevaux et grimper aux arbres à toute vitesse. La plupart des Cullen ont aussi des dons psychiques paranormaux de toute sorte. Edward peut lire dans les esprits, sa sœur Alice lit dans le futur. Nous apprenons que le chef de la famille, un médecin local dénommé le Dr Carlisle Cullen, a contaminé Edward avec le vampirisme après la Première Guerre Mondiale, quand le garçon se mourait de la grippe, ses deux parents étant déjà décédés au cours de l’épidémie. Afin de lui sauver la vie, le Dr Cullen lui a prélevé du sang par la traditionnelle morsure dans le cou, contaminant Edward, le transformant en vampire. A présent le garçon a toujours dix-sept ans, et immortel. Mais le Dr Cullen n’est pas Dracula. La famille qu’il a rassemblée autour de lui, sa femme Esme, et les cinq jeunes de la maisonnée, ont tous été « adoptés » de la même façon, pour des raisons humanitaires.

Edward et Bella deviennent amoureux, mais bientôt la famille découvre un autre clan de vampires non loin dans la forêt. Se trouve parmi eux un vampire sadique du nom de James qui ne voit en Bella rien de plus que de la nourriture et est excité à l’idée d’une chasse provocatrice, car il réalise que les Cullens protègent cette proie humaine. Edward et les autres Cullens défendent Bella, l’aidant à s’échapper pour sa vieille ville natale de Phoenix, en Arizona. Mais James la poursuit jusque-là  et la torture avant de la tuer. Elle est sérieusement blessée, mais Edward et sa famille arrivent juste à temps pour la sauver. Ils tuent James (en le déchiquetant et en brulant les différentes parties de son corps), et ensuite ils retournent tous à Fork. L’histoire se termine lors d’une soirée au lycée alors qu’Edward et Bella dansent ensemble et réalisent qu’ils sont désespérément amoureux l’un de l’autre. Bella murmure qu’elle veut qu’ils restent toujours ensemble, et Edward refuse de faire ce qu’il faudrait pour que cela puisse arriver. Alors qu’ils se tiennent étroitement enlacés sans résoudre ce problème de vampires, ils sont secrètement observés par une vampire implacable, Victoria, membre du clan de James. Victoria a l’intention de se venger, laissant ainsi entrevoir l’intrigue pour les prochains livre et film.

Dans le second roman, New Moon, Edward et la famille Cullen organisent une réception pour l’anniversaire de Bella. Alors qu’elle déballe un cadeau, elle perd une goutte de sang en se taillant légèrement avec du papier, et le frère adoptif d’Edward, Jasper, affolé par l’odeur, l’attaque instinctivement pour la tuer. Edward l’arrête à temps, mais il en conclut qu’il est trop dangereux pour Bella d’être liée à leur famille. Avec les Cullens, il quitte Fork afin de la protéger d’eux-mêmes. En raison de son absence, Bella fait une profonde dépression, jusqu’à ce qu’elle noue une forte amitié avec un jeune Indien d’Amérique du nom de Jacob Black. Jacob est amoureux de Bella, et nous découvrirons plus tard qu’il est un loup-garou. Avec les autres loups garous de sa tribu, il tente de la protéger de Victoria.

Lors d’une vision mal-interprétée, Edward en vient à croire que Bella est morte, et il va en Italie où il décide de se suicider, accablé de douleur à l’idée de l’avoir perdue. Mais il est arrêté au dernier moment par l’arrivée de Bella, accompagnée par sa sœur Alice. Lors d’une réunion avec les Volturi, un puissant clan de vampires « royaux », il est dit à Edward que selon une loi des vampires, Bella doit soit être tuée, soit devenir un vampire, car elle a découvert le grand secret de l’existence des vampires. Les Volturi gouvernent le monde des vampires par des lois d’autoprotection, tout comme que le Ministère de la Magie dans Harry Potter,  et ils doivent être obéis. Les Cullens retournent à Fork et votent pour que Bella soit transformée en vampire. Edward n’est pas satisfait de cette décision, car il l’aime telle qu’elle est. Mais il lui offre le choix : ou elle laisse Carlisle la transformer en vampire après l’obtention de son diplôme, ou, si elle est d’accord pour l’épouser, Edward la changera lui-même.

Dans le troisième roman, Eclipse, l’histoire débute par une série de meurtres non résolus à Seattle, dans l’état de Washington. Edward pense qu’ils sont commis par un vampire inconnu incapable de réfréner sa soif de sang humain. Alors qu’Edward et Bella s’inscrivent à l’université, Bella explique à Edward qu’elle souhaiter revoir son ami Jacob Black. Alors qu’Edward craint pour sa sécurité, Bella lui explique que ni Jacob ni sa meute de loups garou ne lui feraient de mal, et elle commence à leur rendre visite de temps à autre. Pendant ce temps, Alice Cullen a une vision selon laquelle Victoria est revenue à Fork. Quelques jours plus tard, Edward demande Bella en mariage et elle accepte.

Bella et les Cullens apprennent que les meurtres de Seattle ont été commis par une « armée » de vampires nouveau-nés, menée par Victoria. Les Cullens s’allient à la meute des loups garou et se préparent à combattre les forces de Victoria pendant qu’Edward, Bella et Jacob campent dans les montagnes, afin de rester cachés pendant les combats. Jacob est alors très contrarié quand il surprend une conversation d’Edward et Bella au sujet de leurs fiançailles, et il menace de rejoindre le combat et de se laisser tuer. Pour l’arrêter, Bella l’embrasse et réalise qu’elle est aussi amoureuse de lui. Pendant le combat, Victoria suit la trace de l’odeur d’Edward jusqu’aux bois dans lesquels  Bella se cache, mais Edward parvient à la défendre. Après la destruction de Victoria et de son armée, Bella explique à Jacob que, bien qu’elle l’aime, son amour pour Edward est plus grand. Lorsqu’Edward lui envoie une invitation à son mariage, Jacob s’enfuit sous la forme d’un loup, irrité et le cœur brisé par la décision de Bella de devenir un vampire.

    Dans le quatrième roman,  Breaking Dawn, Bella et Edward sont mariés, mais leur lune de miel est interrompue quand Bella découvre qu’elle est enceinte. Sa grossesse progresse plus rapidement que la normale et l’affaiblit beaucoup. Edward, craignant qu’elle n’accouche d’un monstre, veut qu’elle avorte, mais elle refuse. Elle manque de mourir lors de la naissance et Edward lui injecte son poison pour lui sauver la vie, la transformant en vampire. Le nouveau-né est une fille moitié-vampire, moitié-humain. Edward et Bella l’appellent Renesmee. Les Volturi entendent parler du bébé, qui leur a été décrit comme un « enfant immortel » (un enfant qui a été mordu par un vampire et a survécu).  Ces enfants n’ont pas le droit de vivre car leur existence sans fin violerait la loi des vampires. Le tribunal Volturi se déplace à Fork afin de statuer sur ce cas, mais les Cullens rassemblent des témoins vampires qui certifient que Renesmee n’est pas un enfant immortel. Ils parviennent à convaincre les Volturi que Renesmee n’est un danger ni pour les vampires ni pour leur secret, et la famille est laissée libre de poursuivre en paix sa nouvelle vie. Tout est pour le mieux.

On pourrait se demander comment une intrigue si mince et si dégoulinante de sang a pu obtenir un si grand succès mondial. Une partie de la réponse réside dans le pouvoir des sentiments  romantiques présents à tout moment dans l’histoire. De nos jours, cependant, la romance présente à la fois dans le texte et dans la forme visuelle est chargée d’une stimulation puissante des sens. Dans la saga Twilight, les principaux personnages sont des jeunes gens très attirants. Par exemple, Bella décrit Edward comme un « garçon de dix-sept ans atrocement adorable ». Dans les deux films sortis à ce jour, Edward est joué par Robert Pattinson, « narcotiquement beau » comme un commentateur féminin l’a dit. Au beau visage de Jacob Black répond l’exposition de son torse musclé et dénudé, comme c’est le cas des autres membres de sa meute de loups garou. Bella, jouée par Kristen Steward, est très jolie (quoique pas autant que ses amies vampires). Les Volturi sont des mannequins de mode très exotiques, extrêmement pâles.

La beauté physique est le liant qui assemble toute cette banale histoire. Si l’on devait atténuer la joliesse et enlever l’horreur de ces quatre romans et des films, il ne resterait plus rien. Ce ne serait rien de plus  que des romans Harlequin  ennuyeux à mourir, pour adolescentes immatures. L’attraction sexuelle et l’appel à des sentiments romantiques, alliés à l’ambiance de mystère,  obscurcissent complètement l’horreur véritable de l’histoire, qui est la dégradation de l’image et de la ressemblance de Dieu dans l’homme, et la fausse proposition selon laquelle consommer le sang d’un autre humain vivant confère la vie. Comme E. Michael Jones l’écrit :

Le Christ et Dracula parlent tous deux de sang et de vie éternelle. Le vampirisme est, comme Renfield le souligne clairement, l’antithèse du Christianisme. Là où le Christ verse son sang afin que ses disciples puissent avoir la vie éternelle, Dracula verse le sang de ses disciples afin d’avoir lui-même la vie éternelle. Dracula est une réécriture du Christianisme selon les canons du Darwinisme Social. Le monstre est simplement l’inversion du Christianisme qui se mettait en place en Europe quand le Siècle des Lumières  était mis en œuvre au travers l’une de ses idéologies pseudo-scientifiques… Selon un procédé satanique typique de l’inversion de l’ordre chrétien créé par le vampire, l’homme parvient à l’immortalité par l’immoralité et en empoisonnant les autres, c’est-à-dire, par la luxure. Le christianisme exalte l’amour ; le vampirisme – selon Darwin, la loi du plus fort poussée à l’extrême – exalte la soif du désir. [5]

 

http jux-user-files-prod s3 amazonaws com 2012 11 08 14 2Dans la saga Twilight, nous assistons à un travail culturel qui transforme un archétype traditionnel du mal en un moralement neutre. Les vampires ne sont plus les « non-morts », ne sont plus possédés par des démons. Il y a de « bons » vampires et de « mauvais » vampires, et parce que le bon vampire est incroyablement beau et détient toutes les autres qualités de la personne de rêve idéalisée par une adolescente, tout est pardonnable. Rappelons ici qu’Edward a dit à Bella qu’il a tué des gens. Rappelons qu’il s’est fait violence pour ne pas la tuer. Rappelons, aussi, que quand les « bons » vampires attrapent un mauvais vampire, ils lui arrachent la tête et déchiquettent son corps de leurs mains et ensuite brûlent ce qu’il reste.

Mais ceci importe peu pour Bella, parce qu’Edward et sa famille font apparemment tout pour changer – bien que ce soit un changement très limité. Ils ne veulent pas être des monstres. Ils sont ce qu’on pourrait appeler des vampires végétariens – ils chassent en forêt et ne boivent que le sang des animaux sauvages. Tout au long des quatre romans, Edward s’est entraîné à combattre son désir du sang de Bella, même si elle désire de plus en plus qu’il la morde et la contamine. Edward,  nous sommes enclins à le croire, est outrageusement « moral », son renoncement ressemble à une chasteté héroïque.  Tout est  tendre et touchant tant qu’on ne se souvient pas qu’il s’agit d’une histoire de sauvages assassins qui ont contaminé des humains normaux et les ont fait rentrer dans leur « famille ». Mais les lecteurs et les spectateurs sont conditionnés pour oublier tout ceci, parce qu’on leur a montré tout au long des épisodes que contaminer les autres peut être un acte salvateur.

Si l’on se réfère à la série télévisée sur les vampires, True Blood, Tal Brooke note que les vampires sont présentés comme une minorité persécutée mal comprise qui doit lutter pour ses droits contre des églises intolérantes.

L’office religieux dans True Blood présente des chrétiens aussi peu sympathiques que pourrait le souhaiter un directeur d’Hollywood.  Il présente une caricature soigneusement étudiée de personnes ignares et ne sachant que pousser des huées – des idiots simples d’esprit demandant encore plus de sang, de feu et de soufre que leurs correspondants vampires. Le public ne peut y échapper, emmagasinant cette image.

Selon une tactique à double sens, le public sait que les vampires sont le mal et cependant  se voit forcé de soutenir les « droits » des vampires en tant que derniers exclus. Tuer des vampires est considéré comme un crime honni mû par une intolérance fanatique. Cependant ils (le public) ont vu le côté noir des vampires dans lequel les mortels sont méprisés, tués et saignés par caprice. Comme une mère co-dépendante cherchant constamment des excuses pour son fils tueur en série et tournant le dos à la réalité, le public a été conditionné pour les voir d’une façon laxiste et pour les excuser – un contrat occulte avec le mal et la Double-Pensée d’Orwell en action.

Selon Brooke, les démons qui ont effrayé les générations précédentes sont à présent considérés par des publics « larges d’esprit » comme de nouveaux moyens de libération.  Ceci, dit-il, fait partie d’un « cirque de la rétine » plus large de la culture contemporaine, celui qui implante  des images de dépravation dans les esprits de millions de personnes par des leurres sensuels qui dépassent les instincts humains normaux de peur et de dégoût.

Il y a corruption quand les images de dépravation pénètrent l’esprit – plus jeune est l’esprit et plus dépravées sont les images, plus puissant est l’impact. Dans le cas d’un jeune enfant, un esprit innocent peut être aisément corrompu. De nombreuses lois communes se fondent sur cette vérité. C’est pourquoi nous avons des chaînes de télévision pour « adultes » et des rayons de librairies pour « adultes » - au moins pour l’instant….

Il y a pouvoir de séduction quand une influence extérieure pénètre jusqu’au plus profond de l’âme et de l’esprit pour y apporter la corruption – pour laquelle le terrain avait été préparé.  La dépravation potentielle se réalise alors et émerge au grand jour. Le mal s’étend et empoisonne, causant des dommages irréversibles. Comme un cancer, il peut s’étendre par le moyen d’individus dans des communautés. A un certain point, une culture peut devenir elle-même corrompue. Les cultures qui ont explosé étaient en pleine dépravation morale : pensons à Rome ou à Sodome. Pensons à ce qui a provoqué le déluge de Noé. [6]

Selon E. Michael Jones, les romans sur les vampires sont apparus précisément à un moment de l’histoire (vers 1800) où la syphilis si redoutée se répandait  sur les traces de la première révolution sexuelle après le Siècle des Lumières. De nos jours, à l’ère des antibiotiques, les symptômes des plus horribles et les plus défigurants de l’infection peuvent être maîtrisés, si l’infection est soignée assez tôt, « libérant » ainsi les dépravés des conséquences immédiates de leurs actes immoraux. En un peu plus d’un siècle, le sexe en série et sans entraves est devenu universel, sans les graves conséquences qui autrefois en avaient empêché son avancée. De même, en un peu plus d’un siècle, les archétypes universels du mal ont été désamorcés. N’étant plus considérés comme démoniaques, ils n’ont conservé que leur mystique d’un danger exotiquement attractif. La corruption de l’imagination créative a toujours ses racines dans la corruption de l’ordre moral – l’ordre au sein de l’individu et de sa culture environnante. Mais la corruption de l’imagination créative peut aussi trouver son origine dans des forces qui demeurent au-delà de la pure chose sociale. A cet égard, le récit par Meyer de sa première inspiration de Twilight est troublant : « je me réveillai (ce 2 juin) après avoir fait un rêve très net. Dans mon rêve, deux personnes tenaient une conversation animée dans un pré dans les bois. Une de ces deux personnes était une fille quelconque. L’autre personne était d’une beauté fantastique, étincelante : un vampire. Ils discutaient des difficultés inhérentes aux faits que A) ils étaient amoureux l’un de l’autre alors que B) le vampire était particulièrement attiré par l’odeur du sang de la jeune fille, et avait beaucoup de mal à s’empêcher de la tuer immédiatement… Bien que j’eusse un million de choses à faire (préparer le déjeuner pour des enfants affamés, habiller et changer les dits enfants, trouver les maillots de bain qui n’avaient pas été rangés à leur place, etc. ) je restai au lit, pensant à ce rêve. J’étais si intriguée par l’histoire de ce couple inconnu que je haïssais l’idée de l’oublier. C’était la sorte de rêve qui vous donne envie d’appeler votre amie et de l’ennuyer avec une description détaillée. (Le vampire avait aussi une si belle apparence que je ne voulais pas en perdre l’image mentale.) »

Meyer continue de décrire ce qui s’est passé pendant l’écriture du livre :

« A ce moment-là, Bella et Edward étaient, tout à fait littéralement, des voix dans ma tête. Ils ne pouvaient simplement pas se taire. Je me couchais le plus tard possible pour essayer de taper tout ce qui était dans ma tête, et finissais par me jeter, épuisée, au lit (mon bébé ne faisait pas encore ses nuits) et une autre conversation commençait dans ma tête. J’avais peur de perdre quelque chose en l’oubliant, aussi je me levais et me plongeais à nouveau sur mon ordinateur. Pour finir, je prenais un crayon et du papier à côté de mon lit pour y pouvoir y transcrire mes notes et prendre un peu de sommeil bizarre. C’était toujours un enjeu excitant le matin d’essayer de déchiffrer ce que j’avais gribouillé sur le papier dans l’obscurité. [7]

Bien entendu, on peut attribuer les propos ci-dessus à l’imagination enflammée d’une mère en manque de sommeil, suivant un rêve impressionnant qui n’a d’autre source que le subconscient naturel. Cependant, Steve Wohlberg, dans un article de 2009 du SCP Journal, souligne une autre éventualité, décrivant ce qui plus tard survint dans le domaine de l’imagination de Meyer après la publication de Twilight. Il commence par une réflexion sur les similitudes entre les inspirations originales des séries Twilight et Harry Potter : « … la saga Twilight a trouvé son étincelle initiale quand Stephény Meyer a fait un rêve inhabituel le 1er juin 2003. Etrangement, le phénomène Harry Potter a commencé lui aussi avec une « révélation » similaire accordée à Joanne Kathleen Rowling en 1990 alors qu’elle quittait Londres en train. « Le personnage d’Harry Potter a juste surgi dans ma tête, tout constitué » a révélé Rowling en 2001. « Après coup,  c’était tout à fait étrange ! ». Elle a aussi déclaré à des journalistes que les livres d’Harry Potter « se sont presque écrits tout seuls. » « Mes meilleures idées jaillissaient souvent à minuit, » a-t-elle déclaré.

Ce qui s’est passé avec Rowling a aussi eu lieu avec Meyer. Quand ces histoires ensorcelantes ont jailli dans les cerveaux de ces deux femmes, aucune d’entre elles n’était un écrivain reconnu. Toutes deux étaient des débutantes. Elles n’étaient pas riches non plus. A présent elles sont multimillionnaires. Leurs expériences sont similaires, avec des fils directeurs communs. Les deux romans sont imprégnés d’occultisme. Il est donc juste de se demander s’il existe une origine surnaturelle à ces révélations ? Si oui, quelle est-elle ?

Stéphénie Meyer a elle-même fourni une indication étonnante. Suite à son élévation inattendue à la célébrité, elle a plus tard avoué,

« Une fois Twilight fini d’écrire, j’ai rêvé qu’Edward venait me rendre visite – mais je m’étais trompée et il buvait du sang comme les autres vampires et  ne pouvait pas vivre de sang d’animaux comme je l’avais écrit. Nous en avons parlé et il était effrayant. » [8]

Qui était cet « Edward » ? Etait-il le subconscient de l’auteur lui disant qu’elle tentait d’apprivoiser ce qui ne pouvait pas être apprivoisé ? Ou était-ce un esprit du mal se manifestant par une image, la pressant de donner à ses lecteurs moins de morale et plus de sang ? Quelle que soit l’interprétation donnée, la question demeure : pourquoi n’a-t-elle pas réalisé que le second rêve était un avertissement ? Dans son entretien, elle le cite tout simplement sans donner une explication sur sa signification, puis continue d’écrire toujours plus selon la même veine. Pourquoi a-t-elle répondu au premier rêve et non au second ? Etait-ce parce qu’elle trouvait beaucoup de plaisir dans le premier et que le sentiment malheureux du second était une chose qui devait être rejetée comme mauvaise ? La conscience ne peut pas être totalement éradiquée de la nature humaine, et quand elle soulève des vérités douloureuses et inopportunes, l’individu (ou la culture dans laquelle il vit) peut soit y faire attention, soit la neutraliser par une stratégie de dénégation. L’attention ne se porte plus sur la vraie situation pour se concentrer sur des symptômes prédominants en ignorant leur cause première.

Dans la saga Twilight, le vampirisme n’est pas identifié comme la cause première de tous les carnages,  mais le mal est attribué à la façon dont la personne vit son vampirisme. Bien que Bella soit tout d’abord choquée par la vérité au sujet du passé de cette famille (meurtre, démembrement, succion du sang des victimes), elle est cependant bouleversée par ses sentiments pour Edward, et son désir ardent de croire qu’il est vraiment capable d’une noble abnégation. Tant et si bien que son instinct féminin naturel de soumission à son prétendant grandit tellement qu’elle désire offrir sa vie à son conquérant. Elle croit avec confiance qu’il ne la tuera pas ; elle veut qu’il boive son essence et la contamine. Ceci lui donnera un magnifique amour sans fin et le rôle historique d’avoir créé avec son amant une nouvelle sorte d’être humain. Ils auront des pouvoirs surnaturels. Ils seront des vampires moraux – et ils seront immortels.

Ici est alors enchassé le récit spirituel (probablement invisible par l’auteur et aussi par son public) : Vous serez comme des dieux. Vous vaincrez la mort selon vos propres conditions. Vous serez maître de la mort. Le bon et le mal ne sont pas nécessairement ce que la civilisation occidentale a, jusqu’à présent, appelé bien et mal. Vous définirez la signification des symboles, de la morale, et de l’identité humaine. Et tout ceci est englobé dans le dernier message : l’image et la ressemblance de Dieu en vous peuvent être l’image et la ressemblance d’un dieu dont les caractéristiques sont sataniques, tant que vous êtes « au fond une bonne personne ».

De cette façon, surfant sur un tsunami d’émotions et de supports visuels enivrants, l’image du mal surnaturel est transformée en une image de bien surnaturel.u

 

[1] Stephanie Meyer, Twilight, New Moon, Eclipse et Breaking Dawn, Little, Brown and Co, New York, Boston, 2005-2008

[2] Tal Brooke, “Vampires Rising”, SCP Journal, Volume 33:2-33-3, 2009, publié par le Spiritual Counterfeits Project, Berkeley, CA, Adresse Internet : http:/scp-inc.org

[3] E. Michael Jones, Monsters from the Id : The Rise of Horror in Film and Fiction, Spence Publishing, Dallas, Texas, 2000

[4] Pour faire plus court, j’ai rajouté à l’histoire d’origine les détails des adaptations des films, mais rien ne modifie l’intrigue ou les personnages.

[5] E. Michael Jones, Monsters from the Id : The Rise of Horror in Film and Fiction, Spence Publishing, Dallas, Texas, 2000. Renfield est un personnage de fiction dans Dracula de Stocker, sous contrôle du Comte mais affligé d’une conscience. Dracula lui offre un apport de nourriture infini, si Renfield l’adore. Renfield refuse et est tué par Dracula.

[6] Tal Brook, « Vampires Rising » SCP Journal, 33-2 – 33-3

[7] Stephanie Meyer, « The story behind Twilight ». www.stepheniemeyer.com/twilight.htlm

[8] Steve Wohlberg, “The menace behind Twilight”, SCP Journal, Volume 33:2-33-3, 2009, publié par le Spiritual Counterfeits Project, Berkeley, CA, Adresse Internet : http:/scp-inc.org. La citation de Meyer au sujet de son second rêve est extraite de E.W.com (Entertainment Weekly)

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